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Les insectes, ces amis des jardiniers

Les insectes, ces amis des jardiniers
 

Face à l'urgence climatique, réinventons notre façon de jardinier. Laissons vivrez nos jardins, sans les contrôler à tout prix. Observons la nature, car les insectes, ces petites bêtes qui mangent nos fleurs et nos légumes, sont aussi nos meilleurs alliés. 

Même dans la bibliothèque de ma fille de deux ans se trouve un livre contant l’histoire d’une petite coccinelle qui aide un jardinier en grignotant les pucerons. « Les coccinelles et les pucerons, c’est vraiment ce qui a commencé la protection biologique intégrée (PBI) », estime Jean-Louis Bossard, cogérant du Jardin Calédonien. L’exploitation agricole de Dumbéa rivière s’est lancée dans la lutte biologique contre les ravageurs à l’aide d’autres insectes il y a bientôt quatre ans. « Aujourd’hui, sur une des trois zones de notre exploitation de 30 hectares, nous avons baissé l’utilisation de chimie de 80 % ! Ça fonctionne ! » se réjouit l’agriculteur. Le Jardin Calédonien a commencé par élever des punaises pour contrer les aleurodes. Depuis un an, l’exploitation agricole élève des coccinelles pour lutter surtout contre les pucerons. Les coccinelles se délectent également de cochenilles et d’œufs de papillons. Le Jardin Calédonien propose à la vente des tubes avec des larves de ces insectes appréciés dans leur chalet ouvert au public les week-ends. « C’est facile de sensibiliser le grand public à la protection biologique intégrée avec les coccinelles. Tout le monde connaît. Nous, au Jardin Calédonien, on pense que l’avenir, c’est l’élevage d’insectes auxiliaires pour compenser la chimie. » Le Jardin Calédonien élève ses propres insectes, et se fournit également auprès de la biofabrique, un centre de recherche dans la lutte biologique.

Elevage 79d7b
L'hôtel à insectes fabriqué avec des matériaux sans produit chimique. Il a certe un intérêt éducatif mais son rôle est quelque peu controversé.
En effet, si plusieurs insectes vivent à la même enseigne, les risquesde développement de parasite et la lutte pour la nourriture s'intensifient.  


Un équilibre

« Une biofabrique est une structure ayant pour mission principale l’élevage d’insectes utiles dans la lutte biologique permettant de réduire l’usage de pesticides chimiques au sein d’exploitations agricoles », explique le site Internet de la province Sud. La première biofabrique de Nouvelle- Calédonie a vu le jour en 2010 à Saint-Louis, sur le site de l’Institut agronomique calédonien (IAC). Les collectivités, les chercheurs et les agriculteurs tentent ensemble de trouver des alternatives aux traitements phytosanitaires. La punaise (Nesidiocoris tenius) et la coccinelle (Harmonia arcuata) élevées au Jardin Calédonien sont des insectes naturellement présents sur le Caillou. Même si Jean-Louis Bossard se réjouit des premiers résultats qu’il constate sur son exploitation, « la lutte biologique n’éliminera jamais complètement une espèce. Ce que l’on recherche, c’est un équilibre entre ravageurs et auxiliaires pour pouvoir récolter », explique Christian Mille, chercheur entomologiste à l’IAC, et auteur de Animaux nuisibles et utiles des jardins et vergers de Nouvelle-Calédonie.

Syrphe f1383
La mouche syrphe ressemble à une abeille, ses larves se bâfrent de pucerons et se plaisent sur les pissenlits, marguerites, laitues...  

 

Observer et diversifier

Mais soyons réalistes, le jardinier du dimanche ne va pas élever des punaises et des coccinelles dans son salon pour protéger son jardin. Hervé Jourdan, écologue des insectes à l’IRD, le chercheur Christian Mille ainsi que Jean-Louis Bossard donnent quelques conseils pour favoriser l’équilibre entre ravageurs et auxiliaires dans nos espaces verts. La première règle est l’observation. Plus on regarde ses plantes pousser et mieux on les protège. Déjà parce qu’on peut réagir rapidement. « La nature est bien faite, mais elle est complexe, souligne Jean-Louis Bossard. Travailler avec les insectes, c’est beaucoup d’observation. Nous avons embauché une personne dédiée aux insectes, et une fois par semaine, six personnes font le tour de l’exploitation pour observer ravageurs et auxiliaires. » Les insectes réagissent vite, leurs cycles sont courts, surtout en été, d’autant plus si l’humidité est élevée. Autre conseil essentiel : « La diversification. Nous avons trop artificialisé les milieux agricoles en déséquilibrant tout, constate Hervé Jourdan, de l’IRD. Le modèle sur lequel nous aimons nous baser c’est le jardin mélanésien dans lequel il y a peu de problèmes phytosanitaires. » « Pour maintenir la faune auxiliaire, la diversité dans un jardin, c’est la base », renchérit Christian Mille de l’IAC.

Punaises 8e83c
La punaise verte aux yeux noirs (Nesidiocorus Tenius) de nature vive et vorace.  


Arrêter les insecticides ! 

Lorsque le Jardin Calédonien s’est lancé dans la lutte biologique, il a commencé par remettre de l’herbe sous les cultures hors sol et planter des haies d’arbustes autour des parcelles. Dans son livre Animaux nuisibles et utiles des jardins et vergers de Nouvelle-Calédonie, Christian Mille conseille dans la rubrique Gestion des auxiliaires d’enherber « les inter-rangs des vergers avec des espèces herbacées florifères (...). La présence de pollen est indispensable aux acariens prédateurs ». L’entomologiste incite également les professionnels à planter des haies coupe-vent (notamment avec des bois de fer et des gaïacs) et à pailler. À l’échelle d’un jardin de particuliers, c’est la même chose. Certes, on peut tondre, mais laisser quelques parcelles un peu en friche, mêler différentes sortes de plantes, cela fait venir les auxiliaires mais aussi les ravageurs qui ne mangeront pas les superbes fleurs de la collection de Tatie Yvette. Et même les oiseaux apprécieront. « Un jardin propre, c’est le pire », souligne Hervé Jourdan. Autre conseil essentiel, et évident : « Arrêtez les insecticides ! Les auxiliaires sont les premiers à en pâtir », insiste l’entomologiste. En résumé : on diversifie les plantes dans son jardin, en insistant toujours sur les plantes endémiques, indigènes, et en dernier, on installe des plantes importées. »

Chrysope 940aa
La Chrysope verte ou brune est très efficace contre de nombreux ravageurs : pucerons, cochenilles, punaises, aleurodes... De vrais tigres de la jungle !

On laisse son jardin vivre, sans tailler les « mauvaises herbes » à tout prix, sans tondre tous les quinze jours, voire même en laissant des petites zones de friche qui attireront les ravageurs, lesquels, alors, n’iront pas dans votre potager, et les auxiliaires qui se régaleront des ravageurs. Et on ne met aucun produit chimique. Laissons la nature agir seule ! « En Nouvelle- Calédonie, si on laisse bien les insectes travailler, il n’y a pas de pucerons. Il existe une trentaine de pucerons sur le Caillou, toutes importées. Elles peuvent toutes être mangées par les auxiliaires », affirme Christian Mille. De même pour la pollinisation : « Il n’y a pas de déficit de pollinisation en Nouvelle-Calédonie, les insectes, si on laisse faire le jardin, suffisent largement, complète Hervé Jourdan. Les ressources sont d’abord chez nous. » 

Ils ont collaboré à cet article Le Jardin Calédonien, l’IAC, l’IRD. 

Coccinelle d1f46

Un livre en préparation

Nos deux scientifiques Christian Mille, entomologiste à l’IAC et Hervé Jourdan, écologue des insectes à l’IRD, rédigent actuellement un « Guide agroécologique pour reconnaître, protéger et favoriser les auxiliaires des cultures en Nouvelle-Calédonie ». Le livre présente les insectes auxiliaires par catégorie : les prédateurs, les parasitoïdes, les agents entomopathogènes et les pollinisateurs. Puis viennent les conseils pour favoriser le développement de ces insectes au jardin. Un chapitre est également dédié aux autres moyens agroécologiques. Le livre devrait paraître dans le courant de l’année.

Même dans la bibliothèque de ma fille de deux ans se trouve un livre contant l’histoire d’une petite coccinelle qui aide un jardinier en grignotant les pucerons. « Les coccinelles et les pucerons, c’est vraiment ce qui a commencé la protection biologique intégrée (PBI) », estime Jean-Louis Bossard, cogérant du Jardin Calédonien. L’exploitation agricole de Dumbéa rivière s’est lancée dans la lutte biologique contre les ravageurs à l’aide d’autres insectes il y a bientôt quatre ans. « Aujourd’hui, sur une des trois zones de notre exploitation de 30 hectares, nous avons baissé l’utilisation de chimie de 80 % ! Ça fonctionne ! » se réjouit l’agriculteur. Le Jardin Calédonien a commencé par élever des punaises pour contrer les aleurodes. Depuis un an, l’exploitation agricole élève des coccinelles pour lutter surtout contre les pucerons. Les coccinelles se délectent également de cochenilles et d’œufs de papillons. Le Jardin Calédonien propose à la vente des tubes avec des larves de ces insectes appréciés dans leur chalet ouvert au public les week-ends. « C’est facile de sensibiliser le grand public à la protection biologique intégrée avec les coccinelles. Tout le monde connaît. Nous, au Jardin Calédonien, on pense que l’avenir, c’est l’élevage d’insectes auxiliaires pour compenser la chimie. » Le Jardin Calédonien élève ses propres insectes, et se fournit également auprès de la biofabrique, un centre de recherche dans la lutte biologique.

Elevage 79d7b
L'hôtel à insectes fabriqué avec des matériaux sans produit chimique. Il a certe un intérêt éducatif mais son rôle est quelque peu controversé.
En effet, si plusieurs insectes vivent à la même enseigne, les risquesde développement de parasite et la lutte pour la nourriture s'intensifient.  


Un équilibre

« Une biofabrique est une structure ayant pour mission principale l’élevage d’insectes utiles dans la lutte biologique permettant de réduire l’usage de pesticides chimiques au sein d’exploitations agricoles », explique le site Internet de la province Sud. La première biofabrique de Nouvelle- Calédonie a vu le jour en 2010 à Saint-Louis, sur le site de l’Institut agronomique calédonien (IAC). Les collectivités, les chercheurs et les agriculteurs tentent ensemble de trouver des alternatives aux traitements phytosanitaires. La punaise (Nesidiocoris tenius) et la coccinelle (Harmonia arcuata) élevées au Jardin Calédonien sont des insectes naturellement présents sur le Caillou. Même si Jean-Louis Bossard se réjouit des premiers résultats qu’il constate sur son exploitation, « la lutte biologique n’éliminera jamais complètement une espèce. Ce que l’on recherche, c’est un équilibre entre ravageurs et auxiliaires pour pouvoir récolter », explique Christian Mille, chercheur entomologiste à l’IAC, et auteur de Animaux nuisibles et utiles des jardins et vergers de Nouvelle-Calédonie.

Syrphe f1383
La mouche syrphe ressemble à une abeille, ses larves se bâfrent de pucerons et se plaisent sur les pissenlits, marguerites, laitues...  

 

Observer et diversifier

Mais soyons réalistes, le jardinier du dimanche ne va pas élever des punaises et des coccinelles dans son salon pour protéger son jardin. Hervé Jourdan, écologue des insectes à l’IRD, le chercheur Christian Mille ainsi que Jean-Louis Bossard donnent quelques conseils pour favoriser l’équilibre entre ravageurs et auxiliaires dans nos espaces verts. La première règle est l’observation. Plus on regarde ses plantes pousser et mieux on les protège. Déjà parce qu’on peut réagir rapidement. « La nature est bien faite, mais elle est complexe, souligne Jean-Louis Bossard. Travailler avec les insectes, c’est beaucoup d’observation. Nous avons embauché une personne dédiée aux insectes, et une fois par semaine, six personnes font le tour de l’exploitation pour observer ravageurs et auxiliaires. » Les insectes réagissent vite, leurs cycles sont courts, surtout en été, d’autant plus si l’humidité est élevée. Autre conseil essentiel : « La diversification. Nous avons trop artificialisé les milieux agricoles en déséquilibrant tout, constate Hervé Jourdan, de l’IRD. Le modèle sur lequel nous aimons nous baser c’est le jardin mélanésien dans lequel il y a peu de problèmes phytosanitaires. » « Pour maintenir la faune auxiliaire, la diversité dans un jardin, c’est la base », renchérit Christian Mille de l’IAC.

Punaises 8e83c
La punaise verte aux yeux noirs (Nesidiocorus Tenius) de nature vive et vorace.  


Arrêter les insecticides ! 

Lorsque le Jardin Calédonien s’est lancé dans la lutte biologique, il a commencé par remettre de l’herbe sous les cultures hors sol et planter des haies d’arbustes autour des parcelles. Dans son livre Animaux nuisibles et utiles des jardins et vergers de Nouvelle-Calédonie, Christian Mille conseille dans la rubrique Gestion des auxiliaires d’enherber « les inter-rangs des vergers avec des espèces herbacées florifères (...). La présence de pollen est indispensable aux acariens prédateurs ». L’entomologiste incite également les professionnels à planter des haies coupe-vent (notamment avec des bois de fer et des gaïacs) et à pailler. À l’échelle d’un jardin de particuliers, c’est la même chose. Certes, on peut tondre, mais laisser quelques parcelles un peu en friche, mêler différentes sortes de plantes, cela fait venir les auxiliaires mais aussi les ravageurs qui ne mangeront pas les superbes fleurs de la collection de Tatie Yvette. Et même les oiseaux apprécieront. « Un jardin propre, c’est le pire », souligne Hervé Jourdan. Autre conseil essentiel, et évident : « Arrêtez les insecticides ! Les auxiliaires sont les premiers à en pâtir », insiste l’entomologiste. En résumé : on diversifie les plantes dans son jardin, en insistant toujours sur les plantes endémiques, indigènes, et en dernier, on installe des plantes importées. »

Chrysope 940aa
La Chrysope verte ou brune est très efficace contre de nombreux ravageurs : pucerons, cochenilles, punaises, aleurodes... De vrais tigres de la jungle !

On laisse son jardin vivre, sans tailler les « mauvaises herbes » à tout prix, sans tondre tous les quinze jours, voire même en laissant des petites zones de friche qui attireront les ravageurs, lesquels, alors, n’iront pas dans votre potager, et les auxiliaires qui se régaleront des ravageurs. Et on ne met aucun produit chimique. Laissons la nature agir seule ! « En Nouvelle- Calédonie, si on laisse bien les insectes travailler, il n’y a pas de pucerons. Il existe une trentaine de pucerons sur le Caillou, toutes importées. Elles peuvent toutes être mangées par les auxiliaires », affirme Christian Mille. De même pour la pollinisation : « Il n’y a pas de déficit de pollinisation en Nouvelle-Calédonie, les insectes, si on laisse faire le jardin, suffisent largement, complète Hervé Jourdan. Les ressources sont d’abord chez nous. » 

Ils ont collaboré à cet article Le Jardin Calédonien, l’IAC, l’IRD. 

Coccinelle d1f46

Un livre en préparation

Nos deux scientifiques Christian Mille, entomologiste à l’IAC et Hervé Jourdan, écologue des insectes à l’IRD, rédigent actuellement un « Guide agroécologique pour reconnaître, protéger et favoriser les auxiliaires des cultures en Nouvelle-Calédonie ». Le livre présente les insectes auxiliaires par catégorie : les prédateurs, les parasitoïdes, les agents entomopathogènes et les pollinisateurs. Puis viennent les conseils pour favoriser le développement de ces insectes au jardin. Un chapitre est également dédié aux autres moyens agroécologiques. Le livre devrait paraître dans le courant de l’année.

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